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"Il y a du suspense !"

Updated: Feb 7, 2022


Les lecteurs.trices disent souvent qu’ils ont eu du mal à lâcher « Rien que du grand ciel». Pourtant, ce n’est pas un roman policier, pas un thriller, il ne devrait donc pas y avoir beaucoup de suspense. De plus, l’histoire est à peu près dévoilée dès les premières lignes. Comment est-il possible de maintenir une certaine attente dans ces conditions ?


Un peu (très peu) de technique : j’ai utilisé trois procédés.


L’usage du temps présent dans la narration déroule les actions devant les yeux du lecteur.trice : le personnage ne nous dit pas ce qui s’est passé, il nous dit ce qui se passe, il ne sait pas lui-même où il va, ce qui est derrière la prochaine courbe, le bar d’après, la ville qui suit. C’est un procédé à risque car il a tendance à simplifier la langue, à diminuer la richesse du discours. L’usage du présent d’un bout à l’autre du roman peut rendre l’histoire plate et sans profondeur.


L’utilisation du « je » (cela s’appelle la narration homodiégétique ;)) : le personnage raconte sa propre histoire, ce qu’il vit au moment où il parle, ce qu’il expérimente. Cela crée une certaine tension, mais pose la question suivante : à qui diable le héros raconte-t-il son histoire (et comment), puisqu’il est en train de la vivre ?


La narration à deux voix : en faisant parler deux personnages alternativement, il est facile de couper la parole à l’un juste avant une découverte, un aveu, et laisser le lecteur.trice en attente de savoir ce qui se passera après, ce qui peut pousser à lire un peu plus vite pour connaître la suite.


Ai-je fait ces choix consciemment ?

La narration à deux voix est venue d’elle-même, je voulais dès le départ donner la parole aux deux personnages principaux : c’est leur histoire, leur drame.

J’ai tâtonné un peu plus pour choisir le mode « je ». Au départ, il fallait que Tom soit déconnecté de lui-même, le discours indirect s’imposait donc: il avance, il voit, il pense. Cela n’a pas eu l’effet voulu : le lecteur.trice aussi se tenait à distance de Tom. J’ai donc réécrit le tout au « bon » mode.

La temporalité est le point qui est le plus difficile à mes yeux : écrire au présent, au passé (le temps de la narration), au conditionnel, au futur : tout est possible. Je laisse donc venir la première version. Il m’arrive ensuite de réécrire un extrait du livre « pour voir ». Si c’est meilleur, je change tout.


Donc, il n’y a pas que l’histoire qui compte ?

Non. Un roman est une belle bagnole. Et nous, d’éternels apprentis : cambouis, réglages, polissage, et que ça roule.


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