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Nos vies sous la glace

 

Roman

   

 

Des grappes d’oiseaux se réchauffent en se pourchassant dans le ciel. Je fais ronfler le moteur, un type me sourit. Je regarde les graffitis, la rue sale. Laissons-là ce paradis pour en chercher un autre. L’idée de rouler m’emporte.

 

Je prends la Don Valley, puis la 407, des beignes pleins la bouche. La soufflerie du chauffage se réchauffe peu à peu. Des lignes de véhicules s’étirent au long du lac Ontario. L’eau fume dans le froid. Je croise des bâtiments, des routes, des camions, des feux de circulation. Peu de neige, enfin pas la vraie, la pure, de vieux amas terreux. A partir de la 115, ça roule tout seul. C’est bon de déserter une capitale.

Les marais gelés défilent, paysage blanc et beige. Prairies sans fin. Ciel. Chemins. Les hurlements des trains aux passages à niveau me font sursauter. Je croise des pickups, des villages rectilignes gris sale. Je longe des maisons toutes identiques sous un capuchon de glace. A rouler dans la chaleur de l’habitacle, je m’ensommeille. Je prévois de m’arrêter bientôt.

 

D’aigres souvenirs remontent. Les parents avaient tout abandonné pour venir s’installer sur l’île. Les amis, la famille, le mini-pays. Nous étions des gosses, moi un nourrisson, toi Danny, je t’imagine à cinq ans, sérieux, bonnet de fourrure laissant échapper quelques mèches rouges.

            

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